Le peuple ailé des anges

Diane Morin, ange de la cathédrale de sel
 de Zipaquirà, Colombie

Que sait d'eux une ignorante dans mon genre ? Qu'ils n'ont sensément pas de sexe. Que chérubins et séraphins, anges et archanges ne sont pas de la même eau. Que nous en avons un attaché à notre personne. Qu'ils ont des ailes. Qu'il en est de déchus. Qu'on ne les conçoit que doux et aimables. Qu'ils furent mille fois peints et sculptés. Creusons plus avant.

Fra Angelico, Ange de
l'Annonciation, vers 1437

Je m'aperçois très vite que creuser "sérieusement" n'est pas si simple. Le sujet inspire des sentiments d'un fervent mais hélas peu instructif enthousiasme. J'apprends tout de même que les Anges (stricto sensu) sont le 9ème et dernier échelon d'une hiérarchie qui va de Dieu à l'homme. L'aristocratie ailée est dominée par les Séraphins, suivis des Chérubins et des Trônes. Puis viennent les Dominations, les Vertus, les Puissances. Le dernier chœur rassemble les Principautés, les Archanges et les Anges. A eux tous, ils composent l'armée de Dieu  et, loin du bébé joufflu de l'imagerie populaire, ils sont souvent armés d'un glaive et pourvus d'un corps certes juvénile mais adulte.  

Delacroix, La Lutte de
Jacob avec l'ange, 1861

Au rang de ces fameux guerriers, figurent les archanges dont Saint Michel est le prince incontesté : chef de la milice céleste (sic), il terrasse le dragon dans l'Apocalypse et expulse Satan du Paradis. Des missions plus paisibles leur sont toutefois confiées, telle l'annonciation faite à Marie par Gabriel. A partir du XIIIème siècle, fleurissent les représentations d'anges musiciens. D'adorables doigts s'activent sur des trompettes, tambourins et autres luths. Voir l'armée de Dieu changée en fanfare déplut et le Concile de Trente (1545-1563) en limita la représentation, jugée un brin frivole.  Tiré de la Génèse, le combat de Jacob avec l'Ange ne risquait pas d'encourir pareille réprimande. De cet énigmatique épisode de la Bible, Delacroix fit un tableau de toute beauté qui donne à voir un ange-lutteur à la carrure... divinement athlétique. 

Nicolas Poussin, Assomption
de la Vierge, vers 1630

Et en quoi sommes-nous dans l'apesanteur, gémissez-vous ? Regardez plus haut, voyons ! Dans les rangs supérieurs. Là où Saint Michel est prince et Marie reine. Bien avant de trôner au ciel, la Vierge est entourée d'une volée d'anges, lors des trois épisodes décisifs que furent l'Annonciation, l'Immaculée Conception et l'Assomption. Foin de gaillards, point de guerriers mais, pour escorte, de purs enfançons, la fine fleur de la confrérie. J'ai nommé les Chérubins et les précieux Séraphins. Maintenant, si vous observez bien les trois tableaux ci-dessous (chacun représente un des moments-clés cités), vous verrez les plus impalpables, les plus apesants, si immatériels qu'ils ne sont que plumes et frimousse. Ce sont les Séraphins. Leur nature, leur rôle, leurs propres ailes les désignent comme différents. Un prochain billet leur sera consacré.

Charles Eisen,
circa 1750

Image pieuse d'après
Nicolas Poussin

Francisco de Zurbarán,
1661

Sources : http://www.portatout.net/Pro/Vitrines/Archange/michel.php

http://www.instrumentsmedievaux.org/articles/anges.pdf

http://www.angelfire.com/wi/zoneX/guideanges.html

http://morin-arte.blogspot.com/2014/02/cathedrale-de-sel-de-zipaquiraen-je.html