dimanche 8 juin 2014

Quittons-nous sans gravité


Les billes dansantes de
notre système solaire
C'est fini. Je crois avoir survolé une bonne partie de ce qui pouvait être mis en relation avec l'apesanteur. J'ai fait de mon mieux pour rendre compte du phénomène physique et des lois scientifiques le décrivant. Les acceptions métaphoriques (légèreté, euphorie) et les situations déjouant (vol) ou altérant (immersion) la gravité ont été abordées. J'ai un peu flirté avec le paranormal et l'occultisme (lévitation, voyage astral), cherché et trouvé bien des exemples dans les religions. Nous aurons, au final, partagé notre temps entre les navettes spatiales, les salles de spectacle, les églises et les musées. J'espère avoir donné au travail des artistes 

Anne Friry, Dans tes bras
(plasticiens, poètes, photographes, musiciens... ) la place qu'il méritait et m'être épargné le ridicule de trop de prétention. Le grand absent est sans doute le cinéma. Malgré cela, je suis satisfaite du voyage. Il m'a beaucoup appris. Je n'oublierai pas certaines rencontres (Giotto, Grete Stern, Jim Shaw) ni quelques retrouvailles (Fra Angelico, Chagall, Miro) qui m'ont fait du bien. J'ai laissé ma fantaisie prendre les rennes à sa guise. Ce qui, à l'origine, était un exercice d'école y a probablement gagné. Enfin, j'ai été lue bien plus que je ne l'avais imaginé. Merci aux visiteurs assidus ou occasionnels.


***

samedi 7 juin 2014

L'âme d'un Icare


Voici venue l'heure de faire une manière de conclusion. Elle sera courte. L'apesanteur n'existe que par la pesanteur. C'est une vérité scientifique aussi bien que philosophique. Pendant notre vie sur terre, nous tendons vers l'une par le simple fait de nous savoir régis par l'autre. La légèreté n'est un idéal que parce que le poids gouverne notre existence. Nous sommes fils et filles de la gravité. S'en émanciper est un rêve. Il est salutaire de rêver. Nous sommes des Icares contrecarrés et c'est très bien ainsi.


Gilbert Garcin, Icare contrecarré,
2012


Merci à Diane qui m'avait envoyé cette image aux commencements du blog : je savais qu'elle me serait précieuse le moment venu.

vendredi 6 juin 2014

Apesanteur in blue : la Baigneuse de Miró


Ce tableau sera le dernier publié ici : c'est dire si je l'ai choisi avec soin. Nous avons déjà parlé de Miró ; je me bornerai à dire que La Baigneuse appartient à la période où le peintre catalan explorait le surréalisme. Le sujet de la toile est incontestablement le bleu : celui de la nuit qui imprègne le ciel, la mer et jusqu'à l'air (ne croirait-on pas respirer la couleur ?) La ligne d'horizon, tracée avec netteté et délicatesse, nous invite à considérer l'eau et le ciel dans un jeu de reflet : deux infinis bleus se miroitant.


Joan Miró, La Baigneuse, 1924


Sur ce bleu habité de mouvances et de reliefs, Mi a posé une barque, un poisson et trois petits points rouges dont le syle enfantin achève de faire de ce monde liquide un espace onirique. En son centre, évolue la baigneuse. Fondue dans cet indigo vibrant, elle appartient aux deux mondes. Ses cheveux frôlent les étoiles ; leur reflet se superpose au friselis de l'onde ; ses bras recoupent l'horizon. Le tracé de son corps est réduit à d'infimes lignes. Elle est immatérielle pour avoir infusé sa féminité au monde : la mer, le ciel, la lune en ont hérité. Elle occupe tout l'espace de la toile, tout l'univers. C'est une femme cosmique.  

Petit addendum : De passage à Paris l'été dernier, je suis allée au musée d'art moderne de Beaubourg. On sait que les collections sont immenses et que le Centre Pompidou varie régulièrement les oeuvres exposées. J'ai eu la surprise -et la chance- d'y trouver La Baigneuse. Elle est incroyablement poétique et touchante : la reproduction publiée ici ne lui rend hélas pas justice. Les petits poissons enfantins sont exquis, le bleu vibrant, la femme d'une renversante délicatesse.

Source : http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-miro/ENS-miro.html

jeudi 5 juin 2014

Apesanteur radieuse : le baptême du petit jour


Cette photo de Spencer Tunick est à mes yeux un sommet de poésie. Elle nous offre une interprétation infiniment subtile de l'apesanteur. L'image diffère des nus de masse qui ont fait la réputation du photographe. Ici, les participants ont été placés de façon à ce que chacun soit distinct. Tous sont nus mais couverts d'un long voile diaphane qui tombe jusqu'à leurs pieds. Placés dans un paysage désert, les figurants sont de profil, tournés vers le nord. Derrière eux, le soleil se lève et inonde la scène. Les voiles capturent la lumière, formant des halos qui révélent les silhouettes à contre-jour.


Protestations Kiev
Festival de Burning Man, août 2013, Spencer Tunick


La photographie a été prise à l'occasion des rencontres artistiques de Burning Man, dans le désert du Black Rock au Nevada. Rendez-vous avait été donné en fin de nuit afin que tout soit prêt lorsque le soleil se montrerait. Une des grandes beautés de l'image tient à la progression de la lumière qui baigne d'incandescence les silhouettes les plus reculées alors que celles du premier plan sont encore bleues de nuit. Au fur et à mesure qu'elle atteint les rangs, la lumière opère une métamorphose : les sihouettes s'illuminent comme des bougies. Forte de résonances spirituelles, l'image parle -à qui le veut bien- la langue du panthéisme.


Source : http://burners.me/2014/05/15/desert-spirits-get-naked/

mercredi 4 juin 2014

Design apesanteur : la lampe fantôme


La Phantomenal III
L'image du jour -illustration publicitaire- vaut non par les qualités de la photographie mais par l'objet qu'elle présente. Quelques designers se sont plu à créer de facétieux objets donnant l'illusion d'être en apesanteur : verres où le liquide versé reste en suspension (jeu de double fond) ou lampes dont une partie de l'abat-jour flotte au-dessus de l'ampoule (par lévitation électromagnétique). Echapper aux lois de Newton est du dernier chic ! Voici la Phantomenal. Contraction anglaise de phantom et phenomenal, son nom entend souligner le caractère surnaturel et unique de l'objet.


Le jeune designer Godrik Van Deum l'a réalisée pour Gvesner, studio de création fondé par deux passionnés d'art contemporain. Ils ont oeuvré à trois, animés du désir de dépasser les limites de l'objet utilitaire décoratif pour atteindre à l'objet de collection. Si la qualité des matériaux et le fini de la réalisation sont irréprochables, c'est à l'illusion d'optique -flottement en apesanteur brillamment simulé - que la lampe Phantomenal doit son cachet. Ni accrochée au mur, ni suspendue au plafond, elle est tout simplement posée au sol, soutenue par le câble d’alimentation qui semble souple mais a, en réalité, été rigidifié par thermoformage. La mise au point a demandé des mois de recherche. La vraie bonne idée reste, à mon sens, d'avoir opté pour un modèle basique, éminemment familier : voir flotter à 75 cm du sol un objet high-tech très stylé causerait moins d'effet que surprendre cette bonne vieille lampe de chevet que nous jurerions tous avoir eue, en flagrant délit d'envol. 


Sources : http://www.boite-a-design.com/p-62-lampe-white-eternite-apesanteur.html
http://www.phantomenal.com/press/phantomenal_press_review.pdf
http://www.marieclairemaison.com/

mardi 3 juin 2014

Apesanteur symboliste : le char d'Apollon


Le Char d'Apollon1906
L'oeuvre d'Odilon Redon (1840-1916) est captivante. Je suis étonnée que la renommée du peintre ne soit pas plus étendue. Généralement classé au rang des symbolistes, plus finement adoubé peintre des rêves par une exposition qui lui fut consacrée au Grand Palais en 2011, il fait surgir de ses tableaux des visions étranges, à la fois vaporeuses et grandioses. Ainsi vont les toiles consacrées au char d'Apollon, thème de prédilection qu'il traita entre 1905 et 1914. Aucune source consultée n'établit le nombre exact de versions du Char d'Apollon que Redon réalisa. J'en ai compté onze. Toutes représentent le quadrige du dieu soleil mené en plein ciel, à diverses heures du jour, de l'aube au  soir tombant.

Rappelons que dans la mythologie grecque, le char d'Hélios, dieu du soleil, parcourait le ciel, apportant clarté puis obscurcissement aux jours. Apollon, divinité des arts et de la lumière, lui empuntait parfois son équipage. Peut-être est-ce en le conduisant qu'il parvint à tuer Python, le monstrueux serpent qui vivait au pied du Mont Parnasse. Ces détails sont importants car sur ces toiles, Redon s'est clairement intéressé à la victoire du dieu. Certaines portent le sous-titre explicite de Combat de la lumière contre l'obscurité et toutes donnent à voir -au bas du tableau- les anneaux du serpent agités des convulsions de la mort.


Odilon Redon, Le Char d'Apollon, 1910

Python anéanti, le triomphe d'Apollon est total et c'est cette victoire de la vie que célèbre chacune des toiles de la série. Redon fait éclater les couleurs (à ne pas croire qu'il fut pendant 20 ans le peintre du fusain, adepte exclusif du noir). Peinture à l'huile avec rehauts de pastel, la version de 1910 représente un ciel de matin encore strié d'aurore. La lumière prévaut sur la forme, la dissout ; seuls les chevaux sont distincts, premiers sortis de cette double naissance : celle du jour et celle d'une ère d'où le serpent est banni. Le dieu est comme noyé dans son propre éclat. La pureté du ciel -un camaïeu de bleus enrichi de vert à proximité du char- est admirable. On flotte dans l'éther. Les blancs chevaux tirent vers le haut ; un seul observe la gueule du serpent moribond. La mort du mal rend sa légèreté au monde, comme dompter ses démons (nés de la guerre de 1870) a rendu Redon à la couleur.


Sources : http://www.cineclubdecaen.com/peinture/peintres/redon/chardapollon.htm
http://art-magique.blogspot.com/2012/05/odilon-redon-le-char-dapollon.html (11 versions y sont reproduites)
http://www.culture.gouv.fr/public/mistral/joconde_fr?ACTION=CHERCHER&FIELD_98=REF&VALUE_98=000PE021936

lundi 2 juin 2014

Apesanteur cosmique : l'aurore boréale


L'arc-en-ciel aurait pu faire l'objet poétique d'un billet. D'une certaine façon, cette spectaculaire image, prise de l'ISS, répare ma négligence : l'aurore boréale que l'on voit ici évoque à la perfection une écharpe brillante serpentant autour de la planète bleue. Les aurores polaires sont des phénomènes lumineux essentiellement visibles à haute latitude nord (aurores boréales) ou sud (on les nomme alors australes). Créées par des particules électriques (ions et électrons dont sont chargés les vents solaires) précipitées dans la haute atmosphère terrestre, elles apparaissent sous forme de taches diffuses, d'arcs isolés ou de rubans de plusieurs milliers de kilomètres. D'un vert opalescent, les aurores polaires baignent occasionnellement notre ciel de teintes pourpres ou violacées. Leur luminosité peut dépasser celle de la pleine lune.


Aurore boréale vue de l'ISS le 29 mai 2010, crédit NASA


Je prends superficiellement connaissance de quelques mythes et légendes que les aurores polaires ont inspirés aux peuples de l'Arctique et de Scandinavie. Cela a le mérite de renouveler le bestiaire mythologique (y apparaissent les phoques, les baleines, les rennes, les renards...) et de nous ramener à la thématique de la mort. Dans ces lumières surnaturelles, différentes civilisations ont en effet voulu voir soit des âmes d'enfants morts-nés, soit des esprits jouant ou venus accueillir les nouveaux défunts. Ce qui retient mon attention, c'est qu'aujourd'hui où le phénomène est parfaitement connu (les premières études datent du XVIIème siècle, menées par Pierre Gassendi et Edmond Halley), ce cliché de la NASA apparaît sur plusieurs blogs d'ufologie (étude des OVNI). Sans prétendre détenir une photo de soucoupe volante, ils sont quelques uns à l'avoir choisi comme illustration à la question : et si nous n'étions pas seuls dans l'univers ? Au-delà ou mondes parallèles, les aurores boréales semblent condamnées à éclairer l'imaginaire des hommes. 


Sources : http://www.linternaute.com/science/environnement/photos-terre/aurore-boreale.shtml
http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/aurore_polaire/24145
http://www.transients.info/2014/04/examining-2014-april-grand-cardinal.html

dimanche 1 juin 2014

Apesanteur mystique : Sainte Rita


Si ma mémoire est bonne, le travail de Nicolas Poussin a bénéficié d'un regain d'intérêt à partir des années 80. Je connais à peine son oeuvre (je crois l'avoir surtout vue dans les illustrations des Lagarde et Michard de mes années de lycée) mais cette toile-là me plaît énormément. Elle est, au regard du thème traité, étonnante de sobriété. On y voit une femme survoler un gros bourg de la campagne italienne, portée par des nuages. Ni anges, ni ciel glorieux ne viennent souligner le caractère miraculeux de ce voyage. Son geste est certes empreint d'adoration mystique, mais c'est une femme sans auréole (lors de l'épisode figuré, elle n'est encore ni sainte ni même entrée dans les ordres) qui l'accomplit. Dénuée de toute trace d'emphase, cette représentation de Rita de Cascia est profondément fidèle à l'image que la dévotion populaire se faisait d'elle.


Nicolas Poussin, La Translation miraculeuse
de sainte Rita de Cascia, vers 1633


Patronne des causes désespérées, sainte Rita fut l'objet d'un culte fervent bien avant sa béatification en 1628 et sa tardive canonisation, en 1900. A quoi tient cette dévotion jamais démentie envers celle qui n’a ni fondé d’ordre religieux, ni produit d’écrits spirituels, ni subi de ces sanglants martyres qui marquent délicieusement les imaginations ? Peut-être à ce que l'on sait de sa vie : d'une grande pauvreté, mariée à un homme brutal, perdant ses deux fils fauchés par la peste, c'est une femme de son époque (le XVème siècle), à l'existence somme toute ordinaire. J'apprends que le peintre Yves Klein la vénérait entre autres pour avoir voyagé par la voie des airs. C'est précisément la scène que représente Poussin. Veuve et déterminée à entrer au couvent des soeurs augustines, Rita s'en voit refuser l'accès à trois reprises. Selon les hagiographes, elle reçut une nuit la visite de Saint Jean-Baptiste. Et la voici transportée -c'est la fameuse translation- jusques dans la chapelle du couvent où elle aspirait à entrer. Le vol à dos de nuages n'est explicite dans aucune des versions officielles de la vie de la sainte (on se borne à dire qu'elle se retrouva chez les Augustines sans comprendre comment), mais la légende eut tôt fait de remplir les blancs laissés par l'ellipse narrative et Rita est souvent figurée flottant au ciel, vivante, ce qui la distingue de ses pairs qui, eux, n'y montèrent qu'à leur mort.


Sources : http://www.news.va/fr/news/yves-klein-en-vol-avec-sainte-rita
http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Rita/SteRita.html
http://www.journal-la-mee.fr/484-art-histoire-et-legendes

samedi 31 mai 2014

Dernières pages de l'album


Avant de refermer Apesanteur, je regarde les images que je destinais au blog et qui n'y auront finalement pas trouvé place. J'en choisis six, décidée à consacrer à chacune un billet, même simple. Toutes me touchent et les rassembler dessine un panorama assez complet de ce qui a pu être écrit ici.




1- Odilon Redon, Le Char d'Apollon 2- Spencer Tunick, Burning man 3- Aurore boréale vue de l'ISS ; 4- Nicolas Poussin, La Translation miraculeuse de sainte Rita de Cascia  5- Joan Miro, La Baigneuse  6- La lampe Phantomenal III

vendredi 30 mai 2014

Comme une bulle


Bulles de savon, petit
bonheur de l'enfance
Dans la langue courante, il n'y a au bout du compte que deux choix : on est léger comme une plume ou comme une bulle. Tout le reste (j'improvise : léger  comme un cosmonaute en orbite, comme le rêve, comme une mariée de Chagall, comme une fonction dérivée, comme un ange vaporisé d'hélium, comme un flirt en zéro G ou encore un couscous moléculaire gluten free) n'est que littérature. 

Une fois rappelé qu'une bulle est une sphère d'air gainée de liquide (ou d'une matière en fusion puis solidifiée), qu'en dire ? Reste le plaisir des yeux et la diversité des inspirations.


Bulles de luxe

Vitrine au Printemps Haussman, réalisée
par l'agence Lune Rousse, mai 2012


Bulle plasmique

Salon Laval Virtual 2013 : des bulles de 
savon pour écran de projection


Bulles pour belle

Pour une manucure oxygénée (sic)


Clair de bulle

Anne Friry, Plume, sans date connue


Sources : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/bulle/11670
http://www.sortiraparis.com/loisirs/shopping-mode/articles/52360-eau-de-chloe-vous-offre-un-shooting-gratuit-au-printemps-haussman
http://www.blog-nail-art.fr/

mercredi 28 mai 2014

Ceux dont on dit qu'ils reviennent


Image de film
hélas intraçable
Et oui, les fantômes ! J'imagine que vous vous y attendiez un peu. Les choix qui s'offrent à moi sont vastes : Google images me propose comme entrée fantôme vrai (festival de clichés calamiteux) et les sites dédiés au paranormal rivalisent d'érudition sur la nature des spectres (intentions, apparences, dangerosité...) A cela YouTube ajoute force bandes-annonces. Il est vrai que, côté fantômes, le cinéma s'en est donné à coeur joie : des films d'horreur (Poltergeist, 1982) aux films angoissants (The Others, 2001, adapté de la nouvelle d'Henry James Le Tour d'écrou), des films parodiques (Ghostbusters, 1984) aux histoires d'amour (The Ghost and Mrs. Muir, 1947) c'est tout un répertoire de spectres effrayants ou inoffensifs dont je ne vais retenir 


The grey lady, dans Harry
Potter à l'école des sorciers
que les plus aimables. D'abord par goût personnel, ensuite par intérêt pour leur représentation visuelle. Les extraits de films regardés montrent que, sauf propos gore, plus les fantômes sont agressifs moins on les voit à l'écran : ils se manifestent par mille vilenies (meubles valsant dans la maison, enfants élevés dans les airs, explosions et incendies spontanés) mais sans se montrer. Alors que le fantôme romantique de Sylvie (film de Claude Autant-Lara, 1946) ou les esprits qui vivent en bonne intelligence avec les sorciers dans la série des Harry Potter sont bel et bien figurés impalpables, immatériels et aériens comme il se doit.


Voici un extrait de Sylvie et le fantôme, film au charme désuet de Claude Autant-Lara. Aux côtés d'Odette Joyeux en ingénue, le jeune Jacques Tati tient le rôle du fantôme. 



Sources : http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_de_films_de_fant%C3%B4mes
https://www.youtube.com/watch?v=N_tauQDf4tU

mardi 27 mai 2014

Breath, l'expérience du dernier souffle


Breath, Tomohide Ikeya

C'est en faisant des recherches sur la photo subaquatique que j'avais découvert le travail de Tomohide Ikeya. La charge émotionnelle qui se dégage de ces images est telle qu'il m'avait semblé judicieux d'attendre la thématique de la mort pour les publier. La série Breath, exposée pour la première fois à Tokyo en 2008, nous montre des hommes et des femmes immergés. Selon les photos, ils surnagent ou sombrent, seul(e) ou en groupe, nus ou drapés, dans une eau qui va du gris au noir d'encre. Tomohide Ikeya met en scène la diversité des sentiments qu'être sous l'eau -donc momentanément privé d'air- inspire, c'est le cas de le dire. Le photographe, adepte de plongée sous-marine, sait que la conscience de ne plus pouvoir respirer confronte inmanquablement à l'idée de mort. Breath, via une évidente stylisation artistique, donne à voir comment l'idée de mourir peut être reçue : corps précipités ou gisant, enlacements dignes de jumaux baignés de liquide amniotique, chute hallucinée, résignation, sérénité...

Aucune des photographie de la série n'a de titre en propre.











Source : http://tomohide-ikeya.com/Tomohide_Ikeya/CV.html

lundi 26 mai 2014

Pesée des âmes au jugement dernier


Cathédrale d'Amien, détail
du portail du Jugement dernier
Force est de constater que la seule partie de l'humain supposée être immatérielle passe plus qu'à son tour à la pesée. Quand ce n'est pas un MacDougall qui l'évalue en grammes ou en onces, ce sont nos vaillants archanges qui s'y collent. Evidemment, nous passons de la dimension physique (peser un objet, un corps) à l'ordre métaphysique (peser l'être) et moral (peser les consciences). La question n'en est pas moins à l'aulne de quoi peut-on, en toute justice, peser l'apesant


Papyrus d'Ani, ver 1200
avant notre ère
La civilisation pharaonique avait imaginé un principe de pesée d'une grande force symbolique. Sur un plateau on déposait le coeur à juger (rappelons que lors de la momification, il avait été rangé dans une urne) ; sur l'autre, la plume que Maât, déesse de la justice, de la vérité et de l'ordre de l'univers, portait à sa coiffe. C'est donc à une mesure d'intégrité que les Egyptiens anciens soumettaient l'âme : il fallait que les deux plateaux s'équilibrent, que le coeur fasse le poids avec des vertus. Le Livre des morts donne une description très précise du déroulement de l'épreuve.


Retable du Jugement
Dernier (détail),  Rogier
van der Weyden,1452
Rien de comparable dans la chrétienté où la psychostatie (c'est pour éviter les répétitions) n'apparaît pas expressément dans les textes sacrés. Quelques allusions clairement méta-phoriques autorisèrent néanmoins l'importation du concept. Il chemina de son origine à la Grèce, puis au monde chrétien via la tradition byzantine, avec une variante non négligeable : on pèse non l'âme mais les actions. Les bonnes dans un plateau, les mauvaises dans l'autre. Le plus lourd l'emporte. Les iconographes eurent pour unique option celle de donner aux actions une forme humaine. Là tient tout leur charme : l'âme à juger se dédouble en deux minuscules figurines, l'une pieuse, l'autre pécheresse. Immense et tout puissant, l'archange Michel officie, prenant occasionnellement quelques libertés.


C'est au musée d'art roman de Barcelone que l'on peut voir aujourd'hui ce tableau du maître de Soriguerola, nom donné -faute de connaître son vrai patronyme- au peintre qui, au XIIIème siècle, décora si bien les églises de sa Catalogne natale. La scène est pleine d'une vivacité délicieuse, Saint-Michel faisant valoir au démon dépité que, nonobstant les manoeuvres déloyales du diablotin de gauche, c'est au paradis que cette âme-là est promise.

La pesée des âmes, détail du devant d'autel
de l'église 
Saint-Michel de Soriguerola

Ici, l'ange triche ostensiblement : ça en fera toujours un de moins pour la concurrence semble-t-il raisonner. La concurrence, justement se comporte très mal, en la "personne" des mauvaises actions qui pèsent de tout leur poids pour inverser le jugement en leur faveur. Cette obstination à l'emporter est assez cocasse. La scène censément angoissante prend des allures de vignette BD où les péripéties de l'au-delà sont plaisamment croquées.

Détail de fresque, XIVème siècle,
église 
Saint-Pierre-le-Jeune


Sources : http://mythologica.fr/egypte/psycho.htm
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ma%C3%AEtre_de_Soriguerola
http://www.photos-alsace-lorraine.com/album/1003/Eglise+Saint-Pierre-le-Jeune+protestante