dimanche 19 janvier 2014

Tentative de voir Dans le bleu


Faute de culture, je peux prétendre à la plus absolue sincérité : je vais droit vers la toile qui me séduit le plus. J'ignore si ce tableau est paré d'un sens particulier, typique d'une période créative de Kandinsky, connu ou pas... Mes yeux s'y plaisent assez pour que je m'essaie à un décryptage amateur. Je reçois d''abord le plaisir des couleurs. Dans le bleu me donne à voir ma nuance de vert préférée, celle que, faute de connaître le lexique chromatique, je qualifierai d'opalescente. Ce vert si particulier fait halo aux lignes de force qu'il adoucit. Entre brouillard et lumière, il baigne la composition dans une atmosphère mi-marine, mi-cosmique. La sphère orangée -elle tient du soleil et du fruit- articule la composition, au sens littéral du mot. Elle en est le pivot.

Vassily Kandinsky, Dans le bleu, 1925

Rotule mécanique de cet amas d'angles et de formes pointues, elle imprime à l'ensemble, une douce rotation qu'accompagne la courbe des arcs beige-rosé. L'espèce d'équerre noire semble prête à s'incurver. Pas de doute, le rond l'emporte dans l'image. C'est un engrenage dont les arêtes sont prises dans l'élasticité des couleurs et du mouvement. L'objet-satellite situé en bas, à gauche me déconcerte. Je le trouve. incongru. Cet ensemble baigne dans un bleu où mauve et gris tracent une géographie de dégradés. Une reproduction ne rend jamais justice à l’œuvre originale. Je suis sûre que ce ciel est beau à s'y perdre. L'objet central, alliage de formes et de signes, de transparences et de superpositions est un navire. Massif quoique capable d'osciller et flotter,  je le vois comme un...  stabile au ciel de Kandinsky. 


3 commentaires:

  1. Nous nous approchons en effet des stabiles de Calder, que nous verrons en volume. Ta description est juste et cet objet-satellite est une barque de pêcheur, qui s'approche de l'île au coucher du soleil…
    C'est le constructivisme que je n'aime pas, plus que l'œuvre de Kandinsky.

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  2. Tu es en train de me dire que je n'y vois finalement pas si mal que ça dans le ...noir de l'abstraction. Tant mieux.... Une barque de pêcheur ?! Donc, cet abstrait-là REPRESENTE quelque chose de réel ? Moi qui croyais que l'abstrait était la porte ouverte à toutes les subjectivités du regard, qu'il n'y avait rien à reconnaître donc rien à interpréter. Bon, je défriche. Bref, j'apprends...

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  3. Oui, la scène représentée est bien réelle. Il s'agit d'un paysage. La toile est donc plus une géomatrisation qu'une abstraction.
    On reconnaît une langue de terre noire qui semble porter des constructions (à gauche), une montagne (au centre) et un phare (à droite) ; un bateau jaune, au centre, avec son mat qui traverse le soleil rouge ; et à gauche ,l'objet satellite est une balise nautique avec son fanion.
    L'audace du peintre réside dans la composition. Une scène de ce genre devrait comporter un horizon parfaitement... horizontal comme son nom l'indique. Kandinsky au contraire en fait une oblique plongeante (la terrre noire en diagonale), là où généralement l'usage pictural veut que l'on privilégie les lignes ascendantes. C'est par le jeux des lignes secondaires (le mat du bateau, le losange rouge qui se superpose à la montagne etc), mais surtout par le jeux des couleurs chaudes plus "fortes " que les couleurs froides, que l'artiste permet à l'oeil du spectateur de se promener dans la toile.
    En gros, il propose une composition qui devrait se "casser la gueule", et il la compense par l'action des couleurs entre elles, ce qui est un peu son dada à cette époque.
    De plus, en ne fermant pas l'horizon, il permet à la mer et au ciel de se confondrent en un tout : ce bleu qui donne le titre du tableau et au sein duquel tout semble flotter.

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