Cette toile de l'américain Jim Shaw, pétrie d'inconscient et montée au levain du surréalisme, me ravit. C'est freudien en diable ! Et très culotté. Avant d'être trop sérieux, attardons-nous sur la réjouissante variété de ces moustaches du temps jadis : bacchantes, boucs, toupets, colliers, modèles retroussés, effilés, fringants, tombants, broussailleux, bicolores, en guidon de vélo, version taillée, version sculptée, version brillantinée... Bref, un visuel imprenable sur les mille et une façons de porter beau son poil.
Jim Shaw, Octopus vacuum, 2008 |
Pour le reste, rien n'est simple dans cette peinture. La métonymie (la moustache pour l'homme) est claire et clairement sexuelle. Par ailleurs, il s'agit bien d'aspirer mais ... qui aspire qui et -par extension- qui aspire à quoi ? Au profit de qui l'aspirateur tentaculaire œuvre-t-il ? Est-il un attribut masculin ou féminin ? Y a-t-il parade amoureuse ou nettoyage ? Assaut ou fête galante ? Boniment de camelot, raid aérien ou fiançailles ? Un peu de tout ça, sans doute... Enlevons l'élément central (l'aspirateur). Nous voyons de jeunes dames très comme il faut, sises en tenue d'apparat dans un écrin de verdure. Elles sont gracieusement disposées en demi-cercle et pourraient évoquer des demoiselles d'honneur. Au-dessus d'elles passe un envol de moustaches. On peut les voir prédatrices (oiseaux noirs, crochus, proliférant) ou amies, entre visite de courtoisie et mission de reconnaissance. Réintégrons le vacuum à sa place d'honneur (c'est lui qui fait le titre de l'œuvre) : il flotte en apesanteur, entre les demoiselles et les moustaches. Ses 8 bras aspirants dansent comme des serpents en direction des dames, lesquelles sont ravies. Reste à déterminer de quoi : l'exploit de la technologie domotique (oh, le bel aspirateur !) ou l'arrivée à tire d'aile de ces masculins ornements pileux ? C'est sûr, il y a du ménage dans l'air, mais dans quel sens le mot doit-il ici s'entendre ? Je ne trancherai pas.
Artiste américain, né en 1952 dans le Midland, Jim Shaw s'applique à dépeindre en détail la face grotesque, schizophrène et inquiétante de l’Amérique. L’entreprise de Jim Shaw touche à l’histoire, à la politique et à l’anthropologie : il y déploie des trésors d’imagination et une prodigieuse liberté.
Source : Jim Shaw : introduction à l'O-isme, sur http://www.franceculture.fr/
dommage Nelly ! l'image est en très basse résolution et n'affiche pas de qualité, même à l'écran…
RépondreSupprimerTrès juste en j'en avais bien conscience. J'ai une version papier et vais voir si la scanner donne in meilleur résultat. Autrement, comment réagis-tu à l'étrangeté de la composition ? Te fait-elle sourire ou te met-elle mal à l'aise ?
SupprimerEh bien moi je ne connaissais pas Jim Shaw ! Encore une découverte. Mention spéciale pour ton talent de poète, poil au pouet !
RépondreSupprimer:)